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Stripey

Stripey
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Stripey
24 mai 2007

Je vais au cinéma assez souvent...

Il s'agit donc de lister tous les films vus depuis le début de l'année, en faisant le choix d'assumer l'envie de m'être déplacé pour un nombre important de bouses.

Hollywoodland : Lent, long, poussif

Little Children : Prenant, émouvant, Patrick Wilson me donne envie de pleurer dès qu'il apparaît à l'écran, et Jennifer Connelly aussi (j'ai été marqué à jamais par son rôle de Marion dans Requiem For A Dream).

Les Ambitieux : Convenu, mais Karine Viard sauve le tout en faisant du Karine Viard

History Boys : Prétentieux, pas crédible pour deux sous, les 80's promises ne sont effleurées que parles 15 premières secondes de Love will tear us apart de Joy Division

Blood Diamond : Jennifer, Jennifer, Jennifer....

La Vie des Autres : Au risque de me faire lyncher, je suis resté de marbre... la langue allemande peut-être, j'ai été traumatisé par des profs tyranniques.

Bobby : Rien que pour la scène Sahron Stone vs. Demi Moore, où la première fait la manucure de la seconde qui cuve son whiskey en pleurnichant sur son destin de star...

Inland Empire : On ne va pas voir un Lynch pour comprendre, on y va pour y vivre des images. Pendant trois heures, je me suis senti vivant, et personnellement dérangé par les lapins.

Hannibal le Canibale : Pathétique, à se tordre de rire tellement c'est con. Gong Li la Chinoise est désormais la Japonaise de service.

La Môme : Quelle horreur... pocharde, droguée, vulgos jusqu'à l'os, ils l'ont pas arrangée, la Edith... Dès 16 ans, elle était déjà bossue... Et hystérique.

Pars Vite Et Reviens Tard : Faudrait que Régis Wargnier apprenne à faire des films... aussi académique que ses films précédents, si c'est pas scandaleux de bousiller ainsi le bouquin de Fred Vargas...

Bug : Suffocant, parano, dérangeant. On entre ou pas dans la maison qui explose.

7 Ans : Minimaliste, intelligent et sobre. Et je dis oui à Bruno Todeschini, anytime, anyhow, anywhere.

L'Incroyable Destin de Harold Crick : Bonne comédie qui n'en est pas toujours une. Bons moments.

Chronique d'Un Scandale : J'ai adoré, c'est mon côté coeur chammallow qui fond devant l'Angleterre et ses paradoxes, la musique de Glass et les regards de Judi Dench et de Cate Blanchett.

Le Nombre 23 : Ca m'a pas réconcilié avec les maths. Tiré par les cheveux, un peu con-con...

Les témoins : Le film qu'il faut critiquer avec des pincettes, mais la gravité du sujet ne peut excuser les dialogues lourdauds, les situations incompréhensibles et les personnages sans relief. Et dans les années 80, les flics beurs qui assument aussi librement leur bisexualité, yen avait pas des masses. Et pas mal de scènes grandioses : Les jardins du Trocadéro à 1h du matin aussi fréquentés que la Gare de Lyon le jour des départs, Béart, Blanc et Libéreau qui se dandinent à 3 heures de l'après-midi sur une terasse en plein soleil, la robe jaune de Béart, Julie Depardieu qu'il faut réussir à imaginer en cantatrice. Michel Blanc qui finit dans les bras d'un top model exotique... Les fantasmes de Téchiné devraient se limiter à Deneuve.

Mon Fils A Moi : Ouille, ça rappelle des souvenirs de tensions familiales... on dirait un téléfilm de France 2 pour introduire un sujet de "On en discute", mais c'est efficace.

Le Come-Back : C'est un rôle pour Hugh Grant et ça marche.

300 : Démesuré, dépaysant. Qu'on ne me sorte pas les poncifs politiques, je les ais tous lus, ils sont rididcules...

Angel : Plaisir mitigé

La Cité Interdite : Hystérique, mais joli à regarder.

Hellphone : Des critiques horribles, j'y allais à reculons, mais j'ai trouvé ça assez déjanté, et plutôt réussi.

Scandaleusement célèbre : Le personnage est super irritant, mais on s'attache aux seconds rôles encore plus horripilants.

Big Movie : J'ai honte... c'est même pas drôle... mais ya des gens qui croient à ces trucs-là ? Scary Movie était assez con pour être distrayant, mais alors là, non....

La Tête de Maman
: Insupportable, la tête à claques de la gamine... cette comédie qui tombe dans le tragique est une daube informe mal écrite, mal réalisée et mal jouée. Zéro.

Le Prix A Payer : J'assume... j'ai ri en plus.

Anna M. : Flippant, mais assez convenu. Pour Isabelle Carré, à la limite.

Sunshine : C'est tellement gros qu'on y croit quand même. J'ai rarement été aussi tendu pendant un film. Suffoquant, étouffant... l'ivresse des espaces.

Nos Amis Les Terriens
: Raté, dommage, l'idée était bonne. Werber est un bon écrivain avec plein d'idées, mais ça sufit pas.

Les Châtiments : C'était bien con. Qu'est ce qu'Hilary Swank est allée faire dans cette merde ?

Love Et Ses Petits Désastres : Distrayant mais convenu. Très inspiré de Sex And The City et Quatre Mariages.

Très Bien Merci : Efficace, anxiogène. Un copain flic m'a raconté que la réalisatrice avait fait quelques passages en salle de dégrisement dans son commissariat. Ca peut expliquer le propos du film. Il en reste pas moins percutant.

J'veux Pas Que Tu T'En Ailles : Mouais...

Next : On y croit pas deux secondes.

Amer Béton : Un ami m'y a emmené. Je suis incapable de juger ce genre de film, d'ailleurs, j'ai dormi. Je ne peux pas être touché par des dessins animés. C'est pas mon truc...

La Faille : Ca se laisse voir.

Spiderman 3 : J'avais vu ni le 1 ni le 2. je me suis fait chier. C'est creux, lisse, convenu. Sans Surprise.











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19 avril 2007

A droite toute !

Au bureau, il est acquis par 90% des employés que l'on évolue dans un environnement ancré à droite où il est de bon ton d'admirer Nicolas Sarkozy et sa campagne électorale énergique. Ainsi, mes collègues partent du fondement que leur interlocuteur est forcément en accord avec leurs pensées politiques. Les conversations relatives aux élections présidentielles sont par conséquent très orientées : d'avance et par principe, tous les candidats qui se situent à gauche de François Bayrou sont victimes de railleries aussi irrepectueuses qu'incohérentes.

Il ne viendrait pas à l'esprit à mes collègues de bureau que se cachent danc cette grande entreprise libéralo-capitaliste des individus qui ne donneraient pas leurs vies à MM. Sarkozy ou de Villliers, ou même encore Le Pen.

Il est acquis de par ma présence au bureau que j'approuve les idées de l'UMP et que je voterai pour son réprésentant ce dimanche.

Dans mon département, nous sommes trois rebelles à ne pas nous retrouver dans les discours partisans de la majorité de mes collègues de souffrance quotidienne. Nous nous sommes identifiés lorsque, malgré nous, nous avons exprimé de fortes réticences face aux propos & propositions du candidat Sarkozy.

Mais ceux qui sont dans la mouvance de droite ne se rendent pas compte qu'évoluent dans leur espace trois intrus aux dangereuses idées gauchisantes.

J'étais déjà un marginal; je suis désormais encore plus à la marge en raison de mes idées politiques dans un environnement hostile et inadapté. Etre un mouton à cinq pattes ne m'a jamais trop gêné, en particulier lorsque je suis persuadé du bon droit et de la valeur de mes convictions.

Mais il me revient souvent à l'esprit cette phrase "Il n'y a pas de bonheur dans la marginalité"...

16 avril 2007

Sunshine

Je vais au cinéma environ deux fois par semaine, je fais dans l'écclectique, ça permet de varier les plaisirs et les idées.

Ce samedi soir, j'allais sans entousiasme partculier assister à la dernière séance de la journée de Sunshine, en compagnie de Vianney (original comme prénom, non ? au début, il m'a dit qu'il s'appelait Jérôme, va savoir pourquoi... quand on a un prénom si unique, on le clame haut et fort).

J'ai rarement été dans un tel état de stress au cinéma. Ce que je pensais être un autre-film-de-science-fiction-dans-l'espace-avec-un-big-challenge-à-la-clef s'est avéré être un chef-d'eouvre d'angoisse et de poésie. L'histoire est assez simple : notre soleil se meurt, et une équipe xomposée de divers spécialistes part dans un joli vaisseau vers l'astre en question, histoire de balancer une bombe qui devrait le refaire tourner rond (je shématise).

Rien n'est si lisse, rien ne fonctionne aussi bien que prévu, et chauqe contrainte technique place les protagonistes dans une position périlleuse. Rien de bien nouvea au niveau du scénario, mais la qualité de la mise en scène et des images, couplées à une bande-son mi-éther, mi-acide m'a plongé dans 1h45 de tension à s'en bloquer la nuque.

Très esthétique sans tomber dans la facilité vidéo-clip. Filmées intelligemment, les scènes se succèdent en alternant débit d'images rapides et long traveling esthétiques. Il y a pas mal d'incohéences scientifiques, mais ce n'est pas un commentaire. Ce film permet de jongler entre les genres, et on y prendra ce qu'on voudra.

16 avril 2007

Je suis un Mass-Downloader

J'ai répondu à un sondage en ligne pour IPSOS...
http://surveys.ipsos-or.com/wix/p44753921.aspx?site=94&incentive=1.

Cela donne les résultats et l'analyse suivante. j'ai l'impresion de m'être transformé en geek ou nerd de seconde zone... la honte... Je me demande quel genre de résultats obtiennent les vrais nerds...

Selon vos réponses à ce questionnaire, le profil se rapprochant le plus du votre est celui des Mass downloaders. Les Mass-downloaders connaissent très bien le web et aiment en exploiter pleinement les ressources.

Internet les passionne et ils dévorent une profusion d’informations et de contenus en exploitant toutes les fonctionnalités du net : téléchargement frénétique de vidéos, de musiques, de logiciels, de jeux mais aussi streaming, podcasting et partage de fichiers.

Perdus sans accès à Internet, les Mass-downloaders ont le « e-réflexe » : gain de temps dans la vie quotidienne, le web est à la fois un objet de curiosité passionnant et une source d’information indispensable et prioritaire lors de leurs recherches. 

Ils ont également ce réflexe pour effectuer des achats : que ce soit pour commander leurs voyages ou pour acheter CD, DVD et matériel informatique, les Mass-downloaders se tournent instinctivement vers leur écran et flânent dans cet immense magasin virtuel.

Tous ces points font de ces surfeurs expérimentés des membres actifs de la « communauté du web ».

Total des internautes

Passengers

Expectateurs

Chineurs

Companions

Master developpeurs

Mass downloaders

Traders

100%

100%

100%

100%

100%

100%

100%

100%

Sexe

Hommes

53%

47%

50%

40%

50%

85%

68%

86%

Femmes

47%

53%

50%

60%

50%

15%

32%

14%

Age

15-24ans

24%

18%

18%

10%

73%

38%

35%

6%

25-34ans

24%

28%

18%

28%

14%

32%

32%

19%

35-49ans

30%

32%

33%

36%

10%

22%

25%

36%

50 ans et plus

22%

22%

31%

26%

3%

8%

8%

39%

Profession

CSP+

40%

48%

32%

42%

14%

46%

41%

59%

CSP-

27%

25%

33%

34%

17%

19%

27%

13%

inactifs

33%

27%

35%

24%

69%

35%

32%

28%

Ancienneté sur Internet

moins de 1an

10%

6%

20%

7%

8%

1%

5%

4%

1 à 3 ans

26%

26%

36%

25%

30%

10%

18%

17%

3 à 5 ans

31%

36%

26%

30%

38%

24%

31%

26%

plus de 5 ans

33%

32%

18%

38%

24%

65%

46%

53%

10 avril 2007

Le bonheur, c'est malheureux

J'ai longtemps pensé, malgré moi, malgré mon bon sens, que le malheur portait en lui une forme de noblesse. Que celui-ci conférait respect, voire admiration. Qu'il était même de bon ton d'en faire état, non pas en se plaignant ou en pleurant sa douleur en public mais en dévoilant dignement des parcelles de souffrance. Il ne fallait pas seulement souffrir, mais il fallait également que cela se sache, tout en conservant une droiture irréprochable et intègre. Se perdre dans des divagations souffreteuses, pleurer à grands cris ou hurler ses peines n'était pas honorable. Rester droit envers et contre tout.

Mais les autres ne réagissent pas de la manière escomptée : au mieux, ils s'en fichent ou compatissent l'espace d'un instant. Au pire, ils lèvent les yeux au ciel devant cette manoeuvre qui ne trompe personne, observent une forme de mépris face à cet exhibitionisme érigé en style de vie. On devient rapidement ridicule, risible : le malheur n'impresione pas, il est bien trop commun pour inspirer une compassion à long-terme lorsque le sujet navigue d'épreuves en adversités étalées au grand jour.

On ne récolte rien de telles idées. L'indifférence générée apporte de l'eau au moulin du spleen, on s'enferme derrière murs de lassitude révoltée devant ce manque de réaction. On en rajoute, on multiplie les expressions de la douleur dans l'attente d'un geste de compréhension, mais on ne récolte que de la pitié, un sourire gêné ou un rictus dédaigneux.

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7 avril 2007

Papivore

Je mange du papier. Au sens premier du terme. Des feuilles A4, des reçus, des emballages. Au début, j'étais assez discret, j'avalais ma nourriture en me cachant . Puis, au fur et à mesure, je considérais inconsciemment que cette pratique n'avait rien de honteux et je me suis mis à dévorer des post-it, des extraits de mes bloc-notes ou des fax en public, à mon bureau, en réunion, ou à la fin des repas d'affaires.

C'est relativement bon. La texture est agréable, un peu molle, un peu élastique. Il s'agit d'éviter les parties du papier qui contiennent de l'encre, ça rend le tout amer.

Je bois en général beaucoup d'eau (environ 4 à 5 litres par jour). Quand je ne mange pas du papier, je bois. le papier doit par ailleurs assécher ma gorge, ça devient un cercle vicieux.

J'ignore si le papier est calorique ou s'il est difficile à digérer.

Néanmoins, je suppose que c'est meilleur pour ma santé fragile d'avaler des post-it que des fraises Tagada.

6 avril 2007

Sardines

Le voyage quotidien en métro dans les deux sens est toujours source de réflexion. La futilité de l'existence prend toute sa signification dans un lieu comme celui-ci, lorsque, serré entre deux travailleurs endimanchés pour l'occasion professionnelle, j'essaie de trouver un certain confort.

Comment a-t-on pu développer une organisation sociale au point d'en enfermer ses membres dans des sous-terrains engoncés pour les transporter d'un point A à un point B ? Quelle sorte d'animal social est l'homme pour se compliquer la vie en effectuant des allers-retours réguliers entre un domicile et un lieu de travail, où les mêmes questions relatives à son utilité se posent également ?

5 avril 2007

Générations

Gaspar, mon neveu de 8 ans, m'a demandé :

"T'as quel âge ?"

Euh... intéressante, cette question venant d'un petit garçon dont la perception du temps est nettement différente d'une personne de 35 ans. J'ai répondu :

"D'après toi ?"

"22 ans ?"

Délicieux enfant...

"Un peu plus..."

De fil en aiguille, il a trouvé le bon numéro, et je lui ai demandé :

"T'arrives à faire la différence entre une personne qui a 22 ans et une autre qui en a 35 ?"

"Non"

Ceci explique cela.

3 avril 2007

Un Bonheur Insupportable

La bouche de métro juste en bas de chez moi est fermée : il s'agit sans doute de réparer l'escalator qui tombe régulièrement en panne. Désormais, pour rejoindre la Ligne 1 et la station Hôtel de Ville, je suis condamné à traverser les embouteillages matinaux de la rue de Rivoli et faire tournicoti-tournicoton dans le labirynthe des couloirs menant aux quais.

Je me positionne à l'endroit précis où la 3ème porte de la 1ère rame s'ouvrira automatiquement devant moi; je me glisse vers la droite et me plante tel un poireau entre deux strapontins. Je ressens Un Bonheur Insupportable, irrégulièrement hâché par les éclats de voix de jeunes touristes étrangers ou d'hommes d'affaires au rabais expliquant leur dernière réunion dans leur portable.

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Quelles images, quelles scènes défilent dans les esprits ombrageux de mes compagnons de route sous-terraine ? Yeux vitreux, reflets noircis, chaussures cirées. Une femme s'écroule dans l'allée. Les gens s'écartent de la masse qu'elle forme désormais sur le sol, leur regard absent. Elle se liquéfie, tache informe sur le linoleum incolore de la RATP. Le train entre dans la station suivante, les portes s'ouvrent, elle est enjambée.

2 avril 2007

RATP : Radieux, Attentionné, Tolérant, Prévenant

J'ai jamais compris les gens qui disent que les Parisiens font la gueule dans le métro. A croire que ceux qui se plaignent de la tristesse des usagers de la RATP affichent un grand sourire d'ahuri pendant tous leurs trajets et engagent la conversations avec tous leurs voisins de strapontins... Je m'imagine monter dans une rame remplie de personnes qui soudain se tourneraient vers moi en affichant un large sourire : ma parano n'y résisterait pas. Question d'habitude sans doute, mais nos vies citadines nos poussent à tant de méfiance qu'on limite nos rapports en transports au strict minimum.

Par ailleurs, sachant que Paris est essentiellement habité par des provinciaux (à la base), il faut croire qu'ils prennent vite le pli de la grisaille sur le visage...

'Zont qu'à faire la révolution et se mettre à papoter avec le monsieur d'en face qui lit son Expansion et l'interroger sur le cours de l'action L'Oréal... Ou s'incruster dans la conversation de deux secrétaires en train de s'acharner sur leur patron tyrannique. Bonne chance... 'zont de bonnes chances de vous faire envoyer bouler... mais c'est pas grave, il leur arriverait la même chose à Londres, Madrid ou New York.

Et dans mes souvenirs, les gens ne font pas la Danse des Canard ou la Farandole dans le métro de Marseille ou de Toulouse...

2 mars 2007

Résurrection

Comme j'ai peiné sous Paint pour mettre d'à-plomb une bannière digne de ce nom. Bien que je sois certain que je la trouverai indigne sous peu (moins d'une heure).

Je me relance dans le blogging. Le dernier en date ("Tenner treats the gelignite") est mort de sa belle mort fin 2005; il n'aura pas résisté à mes quelques mois "ailleurs".

Le relire m'est totalement indifférent, ce n'est pas moi qui ai pu écrire toutes ces noirceurs. je ne renie rien, j'en extraie d'ailleurs des textes accouchés entre 2002 et 2005, classés ici bas dans Tenneresurrection.

5 novembre 2005

Non-smoking

Aura-t-il eu beaucoup d'expérience avec l'être humain en général ? 

Lorsque ma dernière cigarette s'est retrouvée en cendres recroquevillées sous un mégot au fond d'un cendrier, elle ne savait sans doute pas que c'était la dernière que je fumerais. Le savon qui enleva l'odeur de tabac froid de mes doigts, le fluor qui parfuma l'encens des vestiges de nicotine jusqu'au fond de ma gorge, la dernière bouffée nuageuse de vapeur de goudrons et autres monoxydes de carbone...

Je me pensais mature, en charge et responsable. J'avais passé la trentaine, je pouvais dire "il y a vingt ans..." sans ajouter "j'ai oublié". Je devais m'absenter, partir à l'ombre pour quelque temps, monter sur un cargo crasseux, dépasser les sept mers et m'allonger sous les tropiques. Du Capricorne, du Cancer...

Mon Capitaine m'avait dit : "Vous avez un cancer des poumons. Nodules envahissants à gauche, à droite, en haut, en bas. Une ligne, deux lignes. Une croix". J'avais répondu Amen à la fumée de ce tabac, Amen à cet holaucoste divin, Amen à ce froid constat, Amen à ce tabacologique destin...
 

On continua à me demander : "Pourquoi continues-tu à fumer ?". On me demandait sans relâche en me soufflant au visage des alizés grisâtres de goudron dissous dans l'atmosphère : "Pourquoi continues-tu à fumer ?". Les volutes bleues de vos Gitanes rejoignaient les cumulus et cumulo-nimbus accrochés aux cieux. Ces cieux, ce paradis que jamais vous ne regardiez, vos paupières continuellement sollicitées par les magmas de lave six pieds sous terre. Le feu ne brûle pas uniquement en Enfer. Les anges fument également, comme vous et moi, ils s'ennuient devant le vide, ils stressent devant l'infini, ils tuent leur éternité dans les mouvements des nuages; et si ce n'est de désespoir, ce doit être de plénitude qu'ils soupirent ces charmants S.O.S. 

Je suis né pour mourir d'un cancer, que je fume ou non. La nicotine coule dans mes veines depuis toujours. Et si celle-ci ne s'attaque pas à mes poumons, elle s'en prendra à mon coeur mort, cancérisé. Je suis stressé et oppressé, de douleur, de terreur, vide mais lucide de l'ampleur de mon erreur.

Je suis né pour mourir d'un cancer, que je fume ou non. Le goudron coule dans ma gorge depuis toujours. Et si celui-ci ne se colle pas à mes poumons, il obstruera ma carotide, mon aorte, porte ouverte, nécrosée. Je suis angoissé et tiraillé entre ma ferveur et ma torpeur, grisé et cendré, un crématorium, votre ultime Te Deum.

Je suis né dans un cancer, qu'elle ait fumé ou non. La petite flamme me brûle les yeux depuis un millier de jours. Et si ceux-ci ne pleurent plus, ils n'en meurent pas moins d'impuissance, braises incandescentes. Ils sont voilés et embrumés, l'un tourné vers l'espoir, l'autre vers le noir, c'est louche, je vois trouble, et même double.

"Marlboro, Marlboro Lights, Dunhill Gold, Lucky Strike, Camel Bend, Camel 100's, Craven A, Time, Fine 120, Philip Morris, Gauloises Blondes, Pall Mall, Chesterfield, Davidoff, Gitanes Maïs, L&M, Royale, Winchester, Tabacalera, Benson Hedges...".
 

Mes docteurs m'ont sermonné : "C'est un vrai suicide !!"
J'ai rétorqué : "C'est vrai, et il sera rapide...", et par ailleurs il me manque de temps pour entamer une cure de désintoxication, un sevrage à la vitesse du son, les précédentes ont toutes échoué, ma respiration est saccadée, mon souffle est épuisé, sat à 0%, mes poumons s'emplissent de sang, dites Amen à la fumée de ce tabac, à cet holocauste divin, ma tête se vide, tout est limpide. Il est bien trop dur de mener une vie moderne et libérée de courantes addictions, de veiller sur ma santé, je ne suis pas un sportif de haut niveau après tout, on dit que le culte du corps détruit l'âme.
 

Roulez jeunesse, roulez pelles tabagiques et cigarettes cheap. Roulez dans l'herbe, roulez les herbes vertes que je n'ai jamais fumées. De cendres tu retourneras en cendres, de poussières tu retourneras en poussières. Avais-tu une cigarette incandescente sur ton lit de mort ? Ton ultime soupir était-il un râle enfumé ? Te consumais-tu lors de ton dernier souffle ? 

18 juillet 2005

Culture d'Entreprise

Il existe d'innombrables définitions de la culture d'entreprise, toutes plus compliquées les unes que les autres. Vous pouvez découvrir la culture de la vôtre en vous posant les questions suivantes :

Quels sont les dix mots que vous choisiriez pour définir votre entreprise ?
Qu'est-ce qui est important ?
Qui reçoit des promotions ?
Quel genre de comportement est apprécié ?
Quel genre de personnalité se sent à l'aise dans l'entreprise ?

Toutes les relations au sein de l'entreprise sont basées sur le pouvoir. Ce genre de culture résulte souvent dans des querelles internes concernant les statuts et les privilèges. Ces rapports durs et compétitifs effraient certains employés. Efficacité avant tout. C'est l'objectif qui prime. L'autorité se base sur les compétences et le savoir. Un exemple de cette culture sont les dénominations " senior/junior " (supérieur/inférieur). Cette culture de la répartition des tâches permet, paraît-il, une action efficace et laisse de l'espace à l'improvisation. Les règlements et les processus qui ralentissent le travail sont donc bannis. Les aspects socio-émotionnels ne reçoivent pas beaucoup d'attention. Celui ou celle qui ne parvient pas à se défendre ou qui ne parvient pas à suivre le rythme sera tout simplement remplacé.

Les employés souffrent et ne le disent pas. La précarité d’emploi, la course à l’excellence, les pressions à la performance, la polyvalence, les campagnes de restructuration et la formation continue à un rythme effréné, etc., cochez la case correspondant à votre cas.

En fait, la souffrance s’opérationnalise à partir de la contrainte à mal travailler, la crainte de l’incompétence, l’absence de reconnaissance et les stratégies de défense. Celle-ci s’observe lorsqu’une personne sait ce qu’elle doit faire, mais elle ne peut pas le faire parce qu’elle en est empêchée par des contraintes de travail telles des procédures contradictoires, un climat désastreux et des collègues à contre-sens. Elle correspond aussi à l’impossibilité pour un travailleur de déterminer, avec un minimum d’exactitude, si les échecs qu’il vit sont attribuables à un manque de compétence de sa part ou bien à une défaillance technique n’étant pas de son ressort. Et finalement, l’absence de reconnaissance, va de soit. La reconnaissance n’est pas une question de valorisation personnelle servant à gonfler l’ego des travailleurs; elle a un effet direct sur l’identité de la personne puisque cette dernière investit son intelligence, sa ruse et mobilise ses affects dans l’exécution de son travail. Finalement, les défenses sont ce que le sujet met en place pour se protéger contre les affects pénibles. Les défenses permettent de tolérer l’intolérable et d’accepter ce qui ne devrait pas l’être. Par conséquent, l’effet pervers des défenses est de désensibiliser sur ce qui fait souffrir ou «d’endurcir» face à la souffrance.

Le débat de la souffrance au travail étant encore au stade embryonnaire à l’heure actuelle, les gens éprouvent une honte spontanée à protester contre certaines conditions vécues dans le travail alors que des milliers d’autres vivent dans des conditions beaucoup plus précaires qu’eux. La honte de rendre publique la souffrance engendrée par les nouvelles techniques de gestion de personnel vient inhiber toute action collective en ce sens. En même temps que le travail permis par l’entreprise est le début de la souffrance au travail, elle devient l’héroïne incontestée dans la promesse du bonheur, une sorte de denrée rare que peu ont la chance de goûter.

Bénéficiant d’une certaine abondance de main-d’oeuvre, l’entreprise a le beau jeu face à ses employés. Ces derniers vivent sous la menace du licenciement; par conséquent, ils ont tout intérêt à ne pas lésiner sur les tâches demandées, sinon ils auront leur billet pour la prochaine charrette de congédiement avec les effets que l’on connaît. Dans un contexte économique où l’entreprise domine, la précarisation conduit à l’individualisation des rapports de travail et le mot d’ordre devient le «chacun pour soi»; il faut tenir le coup et «se la fermer», ne pas lâcher et la souffrance des autres, «on n’y peut rien». La stratégie de défense consiste donc à nier la souffrance des autres et à faire le silence sur la sienne propre.

Le discours officiel de l’entreprise sur le travail et son organisation est élaboré afin de servir une propagande à l’extérieur de celle-ci. Rien de nouveau là-dedans, il s’agit du mensonge commercial déjà fort répandu depuis bien longtemps. La différence avec aujourd’hui, c’est que le discours truffé de mensonges est maintenant construit pour servir la propagande à l’interne, pour nourrir la «culture d’entreprise». Les messages d’informations diffusés au sein de l’entreprise pour favoriser les échanges entre les divers secteurs d’activités sont, en fait, un agrégat de mensonges utilisés à des fins propagandistes dans le but de stimuler la production des différents secteurs d’activités.

L’espace laissé vacant par le silence des travailleurs sur la réalité de leur travail est utilisé pour faire de la fausse propagande sur l’entreprise, et ce, tant à l’interne qu’à l’externe. Les travailleurs sont traités comme des crétins et des ignorants. Ils sont manipulés par des informations incomplètes et par des images faisant appel à leur imaginaire plutôt qu’à leur faculté de penser.

Ainsi, le vice est de fait transformé en vertu. L’ingrédient de cette mutation de sens porte le nom de virilité, parfois féminine, ce qui veut dire que c’est sur l’autel de la virilité qu’est sacrifié le courage au nom du mal. Cette virilité professionnelle est la capacité à infliger la souffrance à autrui, sans broncher, au nom de l’exercice, de la démonstration ou du rétablissement de la domination et du pouvoir sur l’autre. Le discours viril est un discours de maîtrise appuyé sur le raisonnement logique et la connaissance, supposé ne laisser aucune ambiguïté ni de zones grises.

C’est grâce à cette virilité que le «sale boulot» se fait dans les entreprises. Celui qui refuse de commettre le mal, ou celui qui n’y parvient pas, est dénoncé vertement comme un «pédé», une «femme», «un gars qui n’a rien entre les jambes», etc… Pourtant, celui qui dit non au « sale boulot », le fait au nom du bien et de la vertu, ce qui nécessite un fort courage puisque le risque de ne pas être reconnu, voire même méprisé et ridiculisé est extrêmement grand. En fait, la virilité se veut une défense contre les effets de l’exécution du «sale boulot».

Pour atténuer cette souffrance, plusieurs hommes et femmes dénient la souffrance d’avoir à faire le sale boulot. Parfois, le déni peut aller jusqu’à la provocation, c’est-à-dire que la participation au sale boulot est clairement annoncée sur un ton sarcastique.

La souffrance silencieuse au travail. L’ampleur de la machine néo-libérale dans la gouverne de nos sociétés post-industrialisées. En mettant au jour un processus qui fonctionne comme un piège, la souffrance devient pensable et avec elle, une autre conception de l’action. Jusqu’où les gens sont-ils prêts à souffrir en silence?

Le contexte social actuel n’est pas une maladie incurable. Il existe un pouvoir d’agir sur ce contexte. Cependant, pour être efficaces, les actions à entreprendre ne doivent pas être qu’individuelles, elles doivent aussi être collectives. Or, les stratégies de défense conduisent à isoler les gens les uns des autres de sorte que la mobilisation devient de plus en plus difficile. Jusqu’où les individus s’éloigneront-ils avant de se rapprocher?

La responsabilité de la direction de l'entreprise est minime, voire même nulle. Elle-même est prise dans ce système d'engrenage et n'a pas la possibilité de revendiquer une telle situation dans le monde du travail. Elle peut être parfois complice, mais à ses dépens, elle-même étant redevable devant d'autres autorités invisibles sur le lieu du travail. Le management a peu de marge de manoeuvre, malgré le discours officiel qu'elle veut bien parfois livrer; elle est généralement tout à fait consciente de cet état de fait qui la dépasse et qui la met également dans une posture de victime. A l'exception près que les incidences sur son devenir sont moins tragiques que pour le reste de l'entreprise. La direction est trop souvent considérée comme la cible idéale pour les personnes en souffrance, puisqu'elle est leur unique référent. Mais le référent ultime est au-dessus de cette direction.

Donc si vous pensez que vous vivez dans un monde moderne, et que votre conception de la modernité rime avec humanité, vous devez vous armer solidement pour évoluer quotidiennement dans votre entreprise. Entre 300 et 400 salariés se suicideraient chaque année sur leur lieu de travail. Une violence perverse au quotidien. Une terreur froide, jamais physique, mais dont la cible humaine sort généralement usée et brisée, parfois même les pieds devant.

8 juillet 2005

Laisse-moi

Cet énorme mensonge familial qui me poursuit et rouille dans mon abdomen, couleur virant au rouge dans mes viscères trouées, un orifice qui se contorsionne telle une masse onduleuse qui va et vient en s'approchant, par derrière, innomé, innommable bien que des voix sacrées s'adressent à lui comme au nouveau Messie. Je transporte cette vacuité qui me pèse des tonnes depuis des jours, le trou noir qui aspire tout avec sa force et qui ne rejette rien, qui conserve les vibrations grinçantes, l'éternel tournoiement de l'attraction des poussières qui se décomposent, des poussières qui m'indisposent.

Je continue d'avaler quotidiennement d'autres poussières, celles qui se collent, celles qui s'étiolent; mes parois ne sont que des murs transparents au travers desquels tout le monde voit, dans lesquels je ne vois que mon reflet. Les mêmes chemins ouverts vers des cercles fermés, mon histoire qui se répète qu'il faut que je répète, mes reconstitutions de montées et descentes annoncées.

Des semaines à transporter un noeud neurotrope, neurasthénique ne variatur, l'anticipation d'une fin d'année en apnée, this and that, mes larmes qui remplissent des verres vides, les rêves où je meurs sont les plus beaux que j'ai jamais faits, ma demeure aux volets et fenêtres fermés, je regarde la bouillie m'emporter malgré le cauchemar qui m'entraîne furtivement; si ce n'est que pour courir dans le hall, puis dans le corridor, se rendre compte que je suis mon propre concierge, ma maison, mon malheur, je m'enferme et me barricade et laisse croître ce vide dans sa cage ouverte, le laisse s'armer et se protéger, et le laisse faire sans bouger, et le laisse hurler sans écouter.

Je suis encerclé, un mutin sans rebellion et chaque fois que vous éventez votre crime, c'est comme si je perdais l'usage de la parole, vous vous placez judicieusement hors de ma portée, vous me laissez comme une plante assoiffée dans un pot à la terre sèche, mes paupières se baissent, mépris ou ignorance, patience et somnolence, je tourne le dos à vos messes, votre déesse vous darde et vous, sous hypnose, vous persévérez dans votre action, mes longs sommeils ne sont que des refuges, mon libertinage professionnel est contrefait et falsifié, mes condamnations sans appel, le face à face qui tourne au duel dérisoire, mes yeux ne s'ouvrent que pour appeler à l'aide, ma voix s'est tue, mes oreilles devenues des écoutilles d'un sous-marin cloué au fond de vos mers en furie, mon substitut de mère post mortem est d'un surréalisme en sursis confondant, mes mains ne sont plus que des poings,... vous n'aurez jamais vu la solitude de ma présence parmi vous.


"Yann, laisse-moi te parler, laisse-moi m'épancher sur le mal démoniaque qui t'a été fait

Je mets un pied dans ton monde et atténue tes souffrances qui n'ont toujours pas cicatrisé."

"Je ne te laisserai pas me parler, n'est-ce-pas l'hôpital qui fait fi de la charité ?
Je passe dans la case d'à-côté, ignorant tes plus belles paroles térébrantes et balbutiées."

"Yann, laisse-moi te parler, tu t'égares dans tes doutes, loin de nous, ton retour en enfance barricadée
Je ne saurais protester, me mettre en faux, te laisser sombrer dans tes secrètes fatalités."

"Je ne te laisserai pas me parler, n'est-tu pas qu'un transfert mal formé, désincarné, prêt à tout dévorer?
Je fermes toutes les serrures de mon corps, la grève de ma fin est une greffe dont je maîtise les méfaits."

"Yann, laisse-moi te parler, je détruierai les vieux fantômes en aller-simple depuis ton passé
Je veillerai sur ton avenir, ma prévoyance, ma clairvoyance seront tes meilleures armes face à l'adversité."

"Je ne te laisserai pas me parler, tes mots ne sont que des paroles d'enfant gâté, rien que des dés pipés
Je laisserai glisser mes larmes, mes yeux en ont vu d'autres, loin de moi tes paroles alambiquées."

"Yann, laisse-moi te parler, ton squelette n'est plus l'armure anonyme du vainqueur dont tu rêvais
Je saurai bien opérer, anesthésier et grâce à ma force définitivement te remettre sur pied."

"Je ne te laisserai pas me parler, mes béquilles sont des glaives qui percent ton appétit d'hospitalité
Je tuerai mes démarches déséquilibrées, sans ton air pollué, quitte à m'en asphyxier."

"Yann, laisse-moi te parler, tes cris sont des pleurs d'un orphelin qui ne parviendra jamais à oublier
Je serai ton mensonge par omission, ta raison d'être au-delà de toutes tes tristes virtualités."

"Je ne laisserai pas te parler, n'es-tu pas qu'un substitut de plus, mon énième pis-aller?
Je saurai m'enfuire loin de tes énergies dépassées, des passés, j'en ai occis par milliers."

"Yann, laisse-moi te parler, n'as-tu pas besoin de ma foi, de ma douceur et de ma sincérité ?
Je deviendrai ton ange gardien, veillant d'un oeil attendri sur ta douleur, ta peine, ta vulnérabilité."

"Je ne te laisserai pas me parler, mon envol m'a mené loin de tes froides férocités
Je passerai prendre mon âme posée sur une parcelle d'éternité, et loin de ta charité, je m'enfoncerai..."

2 juillet 2005

Mort de la Sagesse

"As-tu déjà réfléchi comme tout le monde à la façon dont tu quitterais ce monde? Question à choix multiples"

Qu'une mort subite t'emporte sans que tu aies eu la possibilité de te préparer physiquement et moralement à l'au-delà, ou que ta disparition s'étale sur une période qui te donne l'opportunité de penser à l'ultime modification de ton être, le résultat sera probablement le même; n'empêche que les derniers instants pre mortem seront une absence épaisse, une argile rouge qui aura absorbé ta blanche sève, la fin de ton espèce; ton don de vivre n'aura plus de raisons d'être, seules quelques phrases familières, que feras-tu de ton art personnel, de ton âme singulière?

Nous sommes passés de la mort apprivoisée à la mort interdite. Elle a été perçue comme une chose inopportune, puis comme une injustice ou comme une absurdité, voire comme un anachronisme: nous aurons bientôt le pénible sentiment de connaître la mort juste avant que la médecine ne triomphe enfin de cette fatalité, quitte à attendre des siècles. Le désir d'immortalité, substitut de la peur effroyable de l'inconnu. L'importance de la sécurité dans les sociétés modernes avancées. A défaut de pouvoir trouver la sécurité en Dieu, les hommes ont fait de la sécurité une divinité. Or la mort, même pour les croyants, à l'exception de quelques saints, c'est l'insécurité absolue. En attendant de pouvoir la vaincre, nous voulons bien la nier.

100 naissances se terminent par 100 décès. La vie n'est qu'une maladie mortelle transmise sexuellement. La mort, ton dernier traîtement à cette maladie.

Le vieillissement est ton dernier prologue. Il en résulte une série de dégénérescences qui sont très bien connues et avec lesquelles nous devons vivre. Comme la longévité est une donnée génétiquement programmée, on peut théoriquement mourir en bonne santé; mais quand on est devenu trop vieux, les systèmes ne sont plus capables de s'auto-soutenir. On sait par exemple que les cellules ont une limite de reproduction. On sait qu'il y a des cellules qui ne se remplacent pas comme les neurones par exemple, et d'autres qui se remplacent tranquillement comme les hépatocites. Mais plus le temps passe, moins notre capacité de régénération et de réparation est disponible. Et puis à la fin, c'est le système immunitaire qui commence à se détériorer. Commence alors un processus où notre organisme va être envahi par d'autres organismes. Notre génome perd alors le contrôle de nos molécules. Puis on ne peut plus tomber plus bas dans la vie.

Aucun vivant n'a vraiment le droit de parler de la mort. Et ceux qui l'ont vue de près moins que tout autre: car ils finissent par croire qu'elle ressemble à ce qu'ils ont connu et qui, forcément, n'a rien d'elle.

Arrivera le jour où des savants immortels s'enfermeront dans une cité où tout sera possible. Ils seront pris de vertige, comme à chaque fois que les repères immuables et solides de la culture craquent d'un coup, laissant entrevoir leur relativité. En fait, il s'agira bien d'une véritable orgie, mais d'une orgie où le désir qui s'étanche n'est plus celui de vivre mais de mourir. Sans expliquer l'incompréhensible :

"Quand nous eûmes refermé sur nous les portes de cette colonie soustraite à l'effet corrosif du temps, nous ne savions pas que nous fermions sur nous les portes de notre prison. On s'était dit: "Enfin, nous avons réalisé le rêve de tous les âges, libres et affranchis du temps, nous allons pouvoir nous adonner à la vie totale, sans entraves et sans limitations. Au départ, cette liberté totale fut quelque chose de merveilleux. Débarrassés du poids du passé et de la peur de l'avenir, nous expérimentions ce dont les hommes ont toujours rêvé: l'instant éternel. La science, le plaisir, l'art, tout cela fut goulûment consommé jusqu'à satiété. Toutes les voies furent explorées, toutes les techniques furent essayées et toutes les possibilités épuisées. Puis vint la nausée. En fait nous avions oublié, dans notre orgueil forcené du savoir et du pouvoir, que tout existe par son contraire. Très tôt notre monde fut un non-sens: plaisirs sans joie car sans peine, désirs piégés car sans frustrations et sans limites, sciences sans objet puisque nous savions tout ou presque, art dégénéré, car sans contexte et sans contestation, même la musique sonnait faux car nous n'avions plus rien à pleurer, plus rien à chanter, plus rien à espérer. Nous avions voulu la vie totale, mais la vie sans mort serait-elle une absurdité logique?"

"Oui, la vie pour être ce qu'elle est ne peut qu'être finie. La vouloir sans la mort, c'est vouloir la gauche sans la droite, le haut sans le bas qui fait qu'il est le haut. Comme un cauchemar gris, insipide, gélatineux, indéfiniment renouvelé, sans possibilité de fin ou de réveil."

Je vis sans vivre en moi-même, dans mon espoir sans limites, je meurs de ne pas mourir; dans la seule confiance de mourir un jour, je vis, car c'est vivre que mourir, cette fin m'affirme mon espérance. Ne tarde point, je t'attends, je meurs de ne pas mourir.

La préparation à la mort exige une marge de santé, de tranquillité, de sécurité. La pente douce invite à méditer sur les horizons invisibles, la pente abrupte les voile. Ce qui tue ne prépare pas à mourir. D'où la nécessité de penser à la mort avant qu'elle n'ait raison de nous. Mais au fait, à quoi donc nous sert cette méditation? Apprendre à mourir ne sert pas à bien mourir, mais à vivre moins mal. Certes, le but de l'intelligence, c'est la vérité et donc la mort, puisque la vérité est du côté de la mort. Mais son effet immédiat, c'est d'aider à vivre...on ne croit poursuivre le but que parce qu'on recherche l'effet.

La vie ne vaut pas d'être achetée à n'importe quel prix: C'est pourquoi le sage vit, non autant qu'il peut vivre, mais autant qu'il le doit. Il verra où il doit vivre, avec qui, comment, pourquoi: son unique pensée, c'est la valeur, non la durée de son existence. Mourir tôt ou tard, peu importe; ce qui importe, c'est de bien ou mal mourir. Or bien mourir, c'est échapper au danger de mal vivre.

2 avril 2005

Autre Rive

Tu es celle dont je rêve malgré moi, ton coeur déborde-t-il de peur, de là à en pleurer une mer morte, car je suis sur l'autre rive, sachant où tu te caches, j'y demeure, donc sois sur tes gardes, dans mes rêves, tu es celle qui gisait à mes côtés, en toute liberté, et sais-tu vers où mon amour se glisse, seule Maman sait que je suis l'autre moitié de ce psychopathe, j'y demeure, soit, sois sur tes gardes, ton autre rive, je sais où tu te caches, j'y suis, donc prudence, le temps de mourir est venu, et Elle nous veut tous à ses côtés, afin que les forces s'affrontent...

20 mars 2005

Shoot Me Down

Le dimanche, aux alentours de midi, le métro est quasiment vide. La ligne 11, qui me permet de joindre la station d'Hôtel de Ville depuis celle de République est dans la mouvance. En arrivant sur le quai presque désert, je lève les yeux vers le panneau qui égraine les minutes qu'il me reste à attendre avant l'arrivée de la prochaine rame. 05 minutes.

Peu de monde, un SDF qui tente de dormir au chaud dans un coin, trois touristes avec sac à dos et plan de Paris et un gamin d'une dizaine d'année. Plutôt agité, le garçon, il va d'un endroit à l'autre, scrute le trou béant duquel vont surgir les deux yeux jaunes du train dans un bruit de ferraille, lance un regard vers le plan du métro, puis vers la machine à distribuer les boissons, remonte le quai, le redescend, s'approche du bord, attend dans l'impatience. Il reste 04 minutes.

On s'ennuie sur les quais de métro; on peut regarde ceux d'en-face, s'asseoir sur une chaise pas trop sale, regarder les affiches publicitaires. Le gamin fait tout ça à la fois, mais dans un mode accéléré. De mon côté, je chantonne par-dessus la musique qui entre dans mes oreilles à plus de 100 décibels. Nancy Sinatra m'ordonne en boucle de tirer "Bang Bang, you shot me down", du côté gauche entre sa voix, du côté droit, les guitares alambiquées. La chanson est courte, trois misérables couplets, le refrain à trois reprises. Il reste 03 minutes.

Le garçon a des Nike, un jean, un gros pull et un blouson, je pense à mon neveu de 6 ans qui est une vraie toupie, que je ne laisserai jamais virevolter sur le quai d'un métro parisien. Il m'a déjà assez traumatisé une fois qu'il se penchait un peu trop pour voir arriver le train. Ce que fait ce gamin en ce dimanche d'hiver, un peu de chaleur et de poussières de métro, mais... n'en prenez pas trop. Il reste 02 minutes.

Les saisons changent jusqu'à ce que vienne le jour où on se souvient que l'on jouait à ce jeu stupide "Bang Bang, I shot you down, Bang Bang, you shot me down...". On s'écroulait au sol après ce bruit horrible. Je lève les yeux. Pourquoi ce tunnel ? Pourquoi la laideur de ce train qui ne vient pas ? Pourquoi ces lumières de néon immortels ? Pourquoi ce spleen et ce stress dominicaux, après un matin sans entrain ? Le gamin sautille, scrute le côté gauche, de l'autre côté des rails, le train est arrivé et est parti dans la direction inverse avec son flot de passagers. Il reste 01 minute.

1 minute avant que le train arrive, on a comme un poids de l'attente qui s'en va, stupidement, que sont ces 5 minutes d'attente dans une journée où l'on n'a pas d'engagement ? D'ailleurs, peu de personnes sont venues nous rejoindre depuis que je suis à quai, depuis que Nancy a recommencé sa complainte meurtrière, le bruit atroce des amours mortes qui tombent en poussière sur le sol. Soudain, le gamin s'agite de plus en plus, court dans tous les sens, le panneau n'indique plus que 00 minute en clignotant, on s'affaire, on scrute l'horizon de gauche bouché, le gamin s'approche de plus en plus du bord du quai afin de tenter de voir plus loin, d'anticiper l'arrivée, l'entrée dans la rame, l'esprit qui aura évacué l'attente du train et qui se tournera vers celle de la station suivante, il se penche, se met sur la pointe des pieds... de l'autre côté, les lueurs des yeux du train slaloment sur les parois crasseuses du tunnel, il se penche, il se penche, il trébuche, il tombe, il est à à peine 10 mètres de moi, il tombe d'abord sur le bord du quai, les jambes qui balancent au-dessus des rails, le train se fait attendre, le gosse hurle, personne ne comprend, ce son horrible, il s'écroule au sol, "Bang, Bang"... il glisse vers les rails, une femme et moi courons vers lui pour lui attraper les bras, ce son horrible des roues glissant sur les rails qui résonnent dans le tunnel, un mauvais film au ralenti, le gamin est tétanisé, le gamin hurle, ma béquille est tombée sur la voie, sur sa voix, nous le retenons chacun par un bras, les freins crissent, les yeux jaunes du train, les yeux emplis de terreur du conducteur, nous tirons le gosse, le train freine à en faire hurler toute sa ferraille, trois personnes à terre, un tas humain qui s'accroche à son noyau, cette enfance terrorisée, nos yeux d'adultes qui se croisent, le train qui s'arrête, nos coeurs aussi, "Bang, Bang, that awful sound... My baby shot me down...". 00 minute.

28 février 2005

Aba Aba

En Nouvelle-Guinée indonésienne, les habitants d'une tribu qui se loge au fond d'une vallée éloignée parlent un langage connu uniquement d'eux, à savoir environ 4 000 personnes, un chiffre qui ne risque pas de croître, vus les rapports actuels avec l'armée indonésienne.

Phonétiquement, puisque cette langue n'a pas de forme écrite dans aucun alphabet, les méthodes de salutation et de remerciement se disent toujours "aba". A longueur de journées, on entend donc des dizaines de "aba" venant du fond de la vallée.

En fait, cet "aba" n'a rien à voir avec nos "bonjour", "au-revoir" et "merci" locaux. "Aba" signifie "ta merde". Les indigènes utilisent cette formule apotropaïque, visant à conjurer le sort, en général le mauvais, en se balançant des "ta merde, ta merde" à longueur de temps, sous-entendant que même "ta merde" et "ce que tu as de pire" apparemment, ne les empêcheront jamais de se saluer et de se remercier mutuellement.

Passionnante ethnologie... se mêler à "l'étranger" pour prendre du recul et une certaine perspective à l'égard de nos propres rites sociaux.

Quand j'arriverai au bureau, je vais désormais saluer et remercier par des "aba". On pensera d'abord selon la culture générale de chacun que je suis devenu fan de la variété suédoise ou friand de rognons ou de foies comestibles. Puis on ne pensera plus rien. Seul, je serai seul à penser que mes "aba, aba" n'ont rien d'apotropaïque et que je leur balance réellement "leurs merdes" à la gueule. Je ne suis pas né en Nouvelle-Guinée indonésienne... dommage.

2 février 2005

Espionnage

Quand j’avais une dizaine d’années, je voulais être un espion. La vie est ainsi fait que les vocations d’antan ne se réalisent pas, et j’ai donc dû me résoudre à être lamentablement voyeur. Utiliser mes yeux et mes oreilles pour trouver certaines réponses à des questions posées selon le même procédé. Donc je me surprends à errer dans les lieux publics et écouter des conversations qui ne me concernent pas, ou observer des gens qui n’ont pas envie d’être regardés.

Mais ce qui me gêne le plus à propos de mes yeux, c’est qu’ils sont trop « primitifs » à mon goût. J’ai l’impression que ce sont des caméras datant du début du siècle, avec des filtres et des lentilles particulièrement rudimentaires, je ne peux pas zoomer, les effets panoramiques sont désastreux, les prises sont totalement ineptes, le cadrage est incertain, bref, le résultat n’est pas assez net.

Par exemple, disons que j’entre dans un restaurant et voici ce que mes yeux voient réellement : la porte s’ouvre, se referme, un bras apparaît , suivi d’un plan saccadé lorsque je regarde où je vais bien pouvoir m’asseoir, puis la porte revient dans le champ parce que quelqu’un me bouscule, etc…

Et si à la fin de la journée, je visionnais les rushes de cette séquence, je virerais le caméraman sur le champ. Mais le paradoxe est que lorsque je repense à cette même scène dans le restaurant, ou s’il m’arrive d’en rêver, je me rends compte que tout le travail réalisé par ces deux caméras s’est nettement amélioré par je-ne-sais quel procédé. Je vois un plan bien établi et cadré, une vue d’ensemble assez large, un champ / contre-champ de moi-même et mon convive, la lumière est plutôt bonne et adaptée, et le son est soigné. Mon esprit a tout réparé ce que mes deux caméras d’yeux avaient filmé de travers. Et la même chose se passe lorsque j’essaie de visualiser l’avenir ou me remémorer le passé. Les choses ont été filtrées par mes souvenirs et mes attentes, et toute la vie est comme lissée par ce procédé qui m’échappe.

24 janvier 2005

Tristesse des Pachydermes

En Asie, suite aux vagues déferlantes, on a converti les éléphants aux oreilles courtes en bulldozers. On a vu les pachydermes pleurer alors qu'ils déblayaient les décombres embourbés. On a mis ces larmes sur le compte de leur tristesse face à la destruction de leur environnement.

La Science a publié un démenti : les éléphants pleurent car leurs yeux sont petits par rapport à leur corpulence. Ils ont donc besoin d'humidifier leurs iris et d'intensifier mécaniquement ce processus lorsque leurs yeux sont confrontés aux poussières, débris et autres restes des fracas.

Et sait-on ce qu'on fait les crocodiles ?

Les Indiens n'ont pas écouté la Science et ont continué à regarder les éléphants pleurer leur malheur commun.

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